Moi, je suis complètement toute seule. J’ai 75 ans. Des accidents de la vie m’ont esseulée : je n’ai plus les miens, plus personne. En temps normal, des petits rituels permettent d’atténuer un peu ma sensation de solitude. Je vais chez le kiné. Les courses sont aussi un prétexte pour croiser d’autres personnes. J’en profite pour dire bonjour à la gardienne de la résidence.
Mais Le confinement a soudainement rabougri mon existence. Les journées tirent en longueur, toutes semblables aux autres. La fenêtre de mon appartement donne sur un carré de verdure et sur l’immeuble d’en face. Je ne suis pourtant pas du genre à me laisser aller. La télé a toujours été mon compagnon. Et puis il y a toujours un coin de l’appartement qui mérite du ménage. Avant, je prenais l’air, je marchais un petit quart d’heure dans le jardin de la résidence, et je remontais.
Et puis la peur s’est invitée dans mon quotidien. À force de nous dire qu’on est des personnes à risque, des personnes vulnérables… je ne sors plus. J’ai des prises de sang à faire, je n’y vais pas. Je vis sur mes réserves. Je ne fais plus autant de courses. Je ne suis pas sortie depuis plus des semaines. J’ai peur du virus. A la télé, ils en parlaient. Ça m’a fort secoué quand même.